«La grande expérience pédagogique» des facultés de génie
Malgré tous les bouleversements que la pandémie a provoqués, les facultés de génie dressent un bilan positif de la dernière année d’enseignement en mode sanitaire. Mieux, elles ont mis en place des pratiques qui transformeront la pédagogie même après le retour à la normale.
Comme dans l’ensemble de la société, les mots « adaptation » et « réinvention » étaient sur toutes les lèvres dans les universités québécoises au printemps 2020. Et à l’instar des autres établissements d’enseignement supérieur de la province, les écoles de génie ont dû emprunter la voie rapide vers l’enseignement virtuel.
« On a été capables de se transformer en institution de formation à distance en l’espace d’une fin de semaine! s’exclame Michel Huneault, directeur des affaires académiques de l’École de technologie supérieure. Ç’a demandé un effort très grand et ça ne s’est pas fait sans travail ni souffrance. Mais a posteriori, c’est quelque chose dont on garde une grande fierté. »
« C’était assez facile pour les cours théoriques, mais plus difficile pour les laboratoires, constate pour sa part Pierre Baptiste, directeur adjoint à la formation et à la recherche à Polytechnique Montréal. On a encore une culture de labo où on manipule les objets. Pour certains et certaines, ce fut une superoccasion de passer à quelque chose qui est plus près de ce qu’on voit en entreprise, c’est-à-dire [utiliser] des avatars numériques des objets qu’on contrôle. »
Le travail d’équipe a lui aussi dû se plier aux impératifs sanitaires. « On a demandé à nos profs de donner la chance aux étudiants et étudiantes d’être actifs dans leurs apprentissages, et pas seulement regarder des cours magistraux. On a donc élaboré des méthodes pédagogiques autour d’outils numériques comme Zoom et Teams pour favoriser le travail en équipe », explique André Zaccarin, doyen de la Faculté des sciences et de génie de l’Université Laval.
Des acquis pour l’avenir
Toutes ces embûches n’ont pas freiné la motivation des ingénieurs et ingénieures en devenir. Les trois facultés interrogées par Genium indiquent n’avoir recensé ni baisse importante des inscriptions ni hausse marquée des abandons.
En outre, on a remarqué peu d’effet sur les notes, qui sont demeurées près des moyennes des années précédentes. Fait intéressant : des étudiants et étudiantes en ont même fait une occasion de s’améliorer.
« Les moyennes ont augmenté légèrement, et on a eu plus de notes en haut des moyennes qu’à l’habitude, note André Zaccarin. Je pense qu’on répondait davantage aux besoins pédagogiques des élèves qu’avant. Par exemple, on enregistrait tous les cours et les élèves pouvaient les réécouter quand ils le voulaient. »
Que va-t-il rester de ces chamboulements? Une offre de cours à distance accrue, assurément, mais aussi une approche un peu différente de l’enseignement. « De façon curieuse, j’ai l’impression que les différentes parties prenantes de Polytechnique Montréal [étudiants et étudiantes, de même que membres de l’administration et du corps professoral] n’ont jamais autant travaillé ensemble que depuis qu’ils sont à distance, constate Pierre Baptiste. L’imbrication de toutes les décisions a fait en sorte que les gens devaient travailler ensemble. Paradoxalement, la distance a brisé beaucoup de silos, et ça, c’est très positif. »
« On a vécu une grande expérience pédagogique à distance, ajoute André Zaccarin. On a découvert des pratiques qui sont intéressantes et qui vont rester, sans nécessairement n’offrir que des cours à distance dans l’avenir. Au retour de la pandémie, le prof va pouvoir consacrer plus de temps à l’expérience étudiante et à l’enseignement actif, plutôt que simplement présenter un PowerPoint pendant deux heures. »
« C’est une occasion de remettre en question certaines façons de travailler, conclut Michel Huneault. Tout ce qu’on a établi en si peu de temps ne sera pas perdu. On ne reviendra pas en arrière. »
Photo de couverture: iStock
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