Bonheur au travail : les milléniaux dictent les nouvelles tendances

J’ai récemment eu l’opportunité de m’entretenir avec Jean-Marc Léger, président de la firme de sondage et de recherche marketing Léger, concernant les défis que posent l’attraction et la rétention des talents au sein des entreprises québécoises. Ses propos ont de quoi donner espoir aux jeunes qui ont choisi le génie comme domaine où évoluer professionnellement.

Bonheur au travail

« Il y a 20 ans, on parlait de satisfaction au travail. Il y a 10 ans, c’était d’engagement dont il était question. Aujourd’hui, c’est le bonheur au travail (…) et ce sont les jeunes qui font la différence! » me dit Jean-Marc Léger. C’est d’ailleurs cette évolution qui a poussé sa firme à développer l’indice de bonheur Léger au travail qui évalue la satisfaction de différents professionnels concernant les principaux éléments contribuant au bonheur au travail, soit i) la réalisation de soi; ii) les relations de travail; iii) la reconnaissance de son travail; iv) la responsabilisation (ou les défis au travail); v) la rémunération; et vi) le sentiment d’appartenance. Sur 70 professions évaluées dans une récente étude de Léger, les ingénieurs se classaient au 32e rang. Pas mal, mais… Malgré de bonnes relations avec leurs collègues et une rémunération qui les satisfont plus que la moyenne des professions, la responsabilisation, d’une part, mais surtout le sentiment d’appartenance à l’entreprise, d’autre part, ne les contentent pas de manière générale. Il s’agit pourtant de deux éléments phares en lien avec la rétention des employés. Les entreprises qui se donnent les moyens de jouer cette carte se donnent ainsi la chance d’améliorer leur situation en contexte de pénurie de main-d’œuvre. Mais pourquoi parle-t-on de façon de plus en plus insistante du bonheur au travail? Une partie de la réponse se trouve dans la présence accrue des milléniaux sur le marché du travail.

La montée des milléniaux

Et il s’agit d’une tendance de fond. « D’ici deux ans, les milléniaux seront la cohorte de personnes la plus importante en terme démographique [sur le marché du travail]. Cela va accroître non seulement leur impact sur l’économie, mais également la politique! » C’est une question de nombre. À mesure que les milléniaux se joignent au marché de l’emploi et qu’ils acquièrent des moyens financiers, on s’intéresse à eux de plus en plus. Normal, non? Ainsi, ce qui est important pour eux deviendra de plus en plus important pour les entreprises, mais que recherchent-ils? « Les jeunes aujourd’hui sont ambitieux. Ils demandent plus d’argent, de défis et de flexibilité » affirme monsieur Léger, et bien que le salaire soit un élément important pour attirer les nouveaux employés, il n’est pas, à l’épreuve des études que mène Léger sur le bonheur au travail, un élément de rétention. Cette réalité s’illustre parfaitement lorsque l’on compare les réalités des secteurs public et privé.

Plan de carrière et flexibilité

Si on observe avec attention les chiffres de l’enquête sur la rémunération de Genium360, on remarque que le secteur public rémunère pratiquement autant les jeunes diplômés que le secteur privé. Or, comment expliquer dans ce contexte que le secteur public ne tire pas davantage son épingle du jeu en termes de recrutement de main-d’œuvre? Il y a deux facteurs à considérer selon monsieur Léger : 1) le type de travail (ou le défi qui est proposé au nouvel employé en question) et 2) les possibilités d’avancement. « Quelqu’un de performant va avoir un meilleur plan de carrière dans le secteur privé, affirme sans ambages Jean-Marc Léger. Au niveau de la flexibilité, le privé est encore en avance. » C’est que contrairement aux années 60 et 70, à l’époque où beaucoup d’institutions publiques étaient encore à construire, il y avait beaucoup de projets intéressants pour les jeunes diplômés dans le secteur public. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, se désole monsieur Léger : « Il n’y a pas de projets enivrants. Aujourd’hui, l’initiative et le changement viennent du secteur privé. »

L’ingénieur-gestionnaire

Un autre constat se dégage de l’enquête sur la rémunération de Genium360 : on remarque que la plupart des ingénieurs qui sont les mieux rémunérés occupent des postes qui ont peu à voir avec l’ingénierie, à tout le moins avec sa dimension technique. Ils sont davantage impliqués dans les fonctions d’affaire de l’entreprise. Or, bien que la progression salariale des ingénieurs ait un lien étroit avec le domaine de la gestion, la formation en ingénierie demeure fondamentale selon Jean-Marc Léger. « Les professions de nature technique prennent plus de responsabilités qu’il y a quelques années, puisque les besoins du marché sont plus complexes, et donc le personnel spécialisé est davantage recherché. On est encore dans une ère financière, mais les ingénieurs se démarquent par leurs connaissances techniques, c’est ce qui les distingue par rapport aux autres professions. » L’utilisation croissante des technologies en entreprise a de quoi accentuer cet avantage dans l’avenir. L’enquête sur la rémunération montre également que les ingénieurs détenteurs de MBA gagnent généralement bien davantage que celles et ceux qui n’en ont pas. Ce n’est pas un passage obligé, mais c’est un avantage constate monsieur Léger qui constate que la popularité des programmes de MBA est plus forte que jamais.

En guise de conclusion

Si les jeunes prennent encore du temps à décrocher leur premier emploi, il ne faut pas que les débuts parfois difficiles de leur carrière les découragent. Plusieurs tendances sont présentement à leurs avantages et leur permettent d’espérer non seulement une carrière bien rémunérée, mais également remplie de défis et de possibilités d’avancements. Espérons qu’en plus de changer le marché de l’emploi ces jeunes que l’on dit parfois désintéressés de la sphère publique sauront opérer des changements de société bénéfiques pour eux ainsi que celles et ceux qui leur succéderont. « La politique n’est pas leur priorité pour l’instant, mais ça viendra! » affirme Jean-Marc Léger avec confiance, une confiance qui nous incombe au minimum de garder espoir.

 

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