Incursion dans le monde canadien de la chaîne de blocs

La chaîne de blocs, technologie derrière les cryptomonnaies telles que le BitCoin, est connue pour avoir fait couler beaucoup d’encre. Elle est de plus revenue récemment dans l’actualité suite à l’annonce par Facebook de la création de sa propre monnaie, Libra1. Cependant, que se passe-t-il au nord du pays de l’oncle Sam? Brève incursion dans ce monde occulte avec trois de ses sorciers et sorcières :

  1. Don Tapscott, co-fondateur du Blockchain Research Institute, l’un des seuls organismes de recherche et de consultation sur le sujet
  2. Iliana Oris Valiente, directrice générale de la pratique canadienne d’Accenture en chaîne de blocs
  3. Wes Fulford, président-directeur général de Bitfarms (TSX : BITF), entreprise québécoise de mineurs de cryptomonnaies

Démystifier la chaîne de blocs

La chaîne de blocs est définie par le grand dictionnaire terminologique comme étant une « base de données distribuée et sécurisée, dans laquelle sont stockées chronologiquement, sous forme de blocs liés les uns aux autres, les transactions successives effectuées entre ses utilisateurs depuis sa création. »

[2] Rien de bien sorcier ici, jusqu’à présent. Là où ça se complique, c’est lorsqu’elle a été appliquée au domaine financier et a donné naissances aux cryptomonnaies comme BitCoin et Ethereum. On parle alors de monnaies émises de pair à pair, sans banque centrale grâce à une architecture informatique décentralisée. Iliana souligne cet effet : « La chaîne de blocs a soulevé l’intérêt du privé et du public mais le dénominateur commun de cet intérêt, ce sont les cryptomonnaies. »

Les défis rencontrés par les mineurs québécois

Lorsque questionné sur les défis que Bitfarm a rencontrés, le PDG est sans équivoque : « Ils sont d’ordre législatif. Pendant le processus d’émission d’actions, le gendarme de la bourse de Toronto nous envoyait des lettres avec 60, 70 et même parfois 80 questions. » Don Tapscott va dans le même sens, en soulignant que « les questions proviennent de la peur plutôt que de préoccupations envers l’opérabilité et l’évolutivité. »

Cependant, tous les intervenants s’entendent pour dire que le Québec offre un avantage compétitif indéniable face aux autres provinces et pays grâce à son électricité propre et abordable. Puisque les mineurs résolvent des équations mathématiques, leur efficacité est directement proportionnelle à la puissance informatique qu’ils ont à leur disposition. Le plus gros coût d’exploitation est donc la consommation électrique de ce matériel. À titre d’exemple, Manic-5 a une puissance électrique de 1 596 MW et l’ensemble des sites actuels et projetés de Bitfarm auront une puissance électrique de 159 MW, c’est-à-dire plus de 10%3!

Et le futur des cryptomonnaies?

« Il faut déconstruire la perception qu’ont les gens des cryptomonnaies comme étant des vecteurs du crime organisé », dit Don Tapscott. Étant parfaitement anonymes et sécurisées, celles-ci peuvent en effet servir de plateforme pour les criminels désireux d’échanger des liquidités entre eux4. Pour Iliana, c’est plutôt de prouver que c’est une vraie industrie : « Accenture Canada a publié un rapport en septembre 2019 avec des chiffres qui démontrent que c’est une opportunité intéressante pour les industriels canadiens. »

Wes Fulford est plutôt inquiet de la compétition étrangère : « nos plus gros compétiteurs proviennent de la Chine continentale. Cependant, ils ont des flambées de prix en fonction des saisons, contrairement à ici. » Une chose est sûre, les cryptomonnaies font tranquillement leur chemin dans le monde des affaires québécois grâce à deux facteurs : son électricité peu dispendieuse et son grand bassin de main d’œuvre qualifiée en TIC.

Cet article est issu d’une série écrite suite au Forum Économique International des Amériques (FEIA), à Toronto en septembre 2019.

 

  1. https://www.wsj.com/articles/facebook-building-cryptocurrency-based-payments-system-11556837547
  2. http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=26531717
  3. https://www.bitfarms.io/operations/
  4. https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3102645

 

Photo de couverture par Austin Distel via Unsplash.

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