Un logiciel de soutien phonétique automatisé

Patrick Tremblay est ingénieur logiciel chez CAE depuis 2006. Il a notamment travaillé à la mise à jour des logiciels embarqués du CF-18, l'avion de chasse canadien, au design des commandes de vol (flight controls) des simulateurs d'avions d'affaires, et il y oeuvre actuellement en planification de projets. Entrepreneur aux multiples passions, c'est son intérêt pour l'éducation et son désir d'inventer des solutions pour venir en aide aux autres qui l'ont mené à la conception d'un logiciel de soutien phonétique automatisé. Voici la petite histoire du logiciel de soutien phonétique automatisé, le projet présenté dans le cadre du concours Inventer le monde de demain.

Pourquoi concevoir un logiciel de soutien phonétique automatisé?
Le fait de ne pas savoir lire est un handicap majeur qui limite l'autonomie, l'engagement et la participation sociale. Le taux d'analphabétisme au Canada est malheureusement très élevé. En 2013, le journal La Presse rapportait d'ailleurs que « 1,2 million de Québécois ont une maîtrise si faible de la lecture, qu'ils ne peuvent pas fonctionner normalement ». Face à ce constat, j'ai voulu concevoir une solution automatisée pour aider les personnes souffrant d'incapacités intellectuelles légères, de troubles d'apprentissage et les allophones à apprendre le français. J'ai conçu un logiciel de soutien phonétique automatisé dans le cadre de ma maîtrise en génie, à l'ÉTS, en partenariat avec des chercheurs du Groupe Défi Accessibilité (GDA) du Département de psychopédagogie et d'andragogie de l'Université de Montréal… tout en travaillant à temps plein en planification de projet chez CAE!


Unique en son genre, le logiciel de soutien phonétique automatisé que vous avez conçu s'intègre à Word, comme une extension. Comment fonctionne-t-il?
En bref, mon logiciel permet de faire l'analyse phonétique d'un texte en quelques secondes, afin de le simplifier phonétiquement. D'une part, le logiciel estompe les syllabes muettes (exemple : le « h » du mot « hibou », le « e » du mot « arbre », etc.). D'autre part, on ajoute au texte des archigraphèmes (des sons) au-dessus des graphèmes complexes (par exemple,  « eau », « ault » ou « au » qui se prononcent « o »).  À cet égard, il existe des centaines de façons d'assembler des lettres (des graphèmes) pour entendre le mot « auto ».  Avez-vous déjà imaginé combien d'assemblages de lettres existent pour écrire un mot qui sonne comme « auto »? LES AMIS(La réponse est ici, à voir en plein écran). Et finalement, le logiciel ajoute les liaisons phonétiques entre les mots que nous prononçons à l'oral, comme « les amis ».

En somme, n'importe quelle déclinaison de mots ou de verbes peut se prononcer avec une base de 35 sons! Globalement, le logiciel permet au lecteur d'accélérer l'apprentissage de la lecture grâce à la simplification de l'interprétation phonétique. Sans l'aide du logiciel, adapter un texte avec le soutien phonétique manuellement dans Word prend 15 minutes par page. Avec le logiciel, on passe de 15 minutes de traitement à quelques secondes seulement! Ce qui est intéressant par ailleurs, c'est que le logiciel est dégressif, c'est-à-dire qu'on peut diminuer le soutien phonétique en fonction du progrès du lecteur.

Voici une démo au ralenti de l'action du logiciel (à visionner de préférence avec le navigateur Chrome).

Comment croyez-vous que le logiciel de soutien phonétique que vous avez conçu contribue à inventer le monde de demain?
Il y a un potentiel énorme! D'abord, chaque année au Canada, un très grand nombre d'allophones vont rencontrer des difficultés d'apprentissage du français, ceci pouvant affecter leur autonomie et leur intégration en société. À ce sujet, en janvier 2015, la ministre de l'Immigration rapportait dans La Presse que : « à leur arrivée au Québec, près de la moitié (43 %) des immigrants ne connaissent pas un mot de français ». En simplifiant les facteurs de complexité de la lecture du français, on facilite leur apprentissage. C'est un réel soulagement pour ces personnes qui peuvent enfin lire de façon autonome! D'autre part, le logiciel pourrait permettre de soutenir l’apprentissage des personnes ayant des incapacités intellectuelles, et même de les intégrer en classe régulière. Cette vidéo illustre d'ailleurs la remise du diplôme à un élève du secondaire intégré en classes régulières avec du matériel adapté. Ultimement, le logiciel serait disponible dans les écoles et deviendrait un outil grâce auquel les professeurs pourraient suivre l'évolution des élèves. Ambassadrice du fonds Émilie Bordeleau, Fannie Brissette a été l'inspiration de Patrick Tremblay, ing., M.Sc.A.

Quelles sont les prochaines étapes?
Déployer le logiciel dans les laboratoires du Groupe Défi Accessibilité (GDA), dirigé par M. Jacques Langevin, où il sera mis à l'essai et optimisé. Ensuite, ce sera la diffusion dans les commissions scolaires, et la mise à l'essai dans le cadre d'exercices en classe.

Quel message auriez-vous à transmettre pour inspirer vos pairs du monde du génie?  
En dehors de nos responsabilités professionnelles et des besoins de l'industrie, nous avons la possibilité de nous impliquer dans différentes sphères de la société pour le bien commun. Que ce soit à titre de bénévole pour des OBNL ou d'inventeur, concepteur de solutions pouvant améliorer le monde, allons-y sans hésiter, soyons inspirés!

Si vous aviez des moyens illimités pour améliorer le monde de demain, que feriez-vous?
J'aimerais d'une part que chaque être humain puisse avoir accès à des ressources pour combler leurs besoins de base, et d'autre part, rendre l'éducation accessible gratuitement pour tous à travers le monde. Tout citoyen devrait pouvoir acquérir les connaissances de base pour développer un sens critique et pour s'impliquer socialement. Je souhaiterais augmenter la qualité de vie de tous les peuples du monde par l'accès au savoir et à l'éducation!

Pourquoi avoir choisi de poursuivre une carrière en génie?
Pour gagner les connaissances qui me permettraient d'entreprendre, d'innover, d'inventer, de créer de la valeur.  En tant qu'ingénieur, j'ai des connaissances que je peux utiliser pour venir en aide aux autres. J'ai le pouvoir de créer des solutions qui auront un impact social, et c'est ce qui m'a motivé dans la conception de ce projet. Je veux que mes connaissances d'ingénieur puissent servir à la communauté, améliorer le quotidien des gens, leur autonomie et leur liberté.
 

Découvrez tous les gagnants du concours Inventer le monde de demain 2015

 

 

 

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